Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/92

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La veille de cet affreux événement, il me fit, avec une lucidité remarquable, subir pour ainsi dire un examen approfondi sur la façon dont je devais régir ma fortune ; il parut satisfait et me dit :

« J’ai doublé les biens que mon père m’avait laissés ; ces améliorations ont été le but constant de ma vie, parce qu’elles avaient votre avenir pour objet. Usez sagement de ces biens si vous le pouvez. Rappelez-vous, mon enfant, que tout est dans l’or : honneur et bonheur. Tachez surtout de pouvoir vivre seul : c’est la grande science de la vie… Si vous trouviez une femme qui ressemblât à votre mère, épousez-la… Mais défiez-vous des adorations que vous suscitera votre fortune ; en un mot, ne croyez à aucune apparence avant d’en avoir sondé toutes les profondeurs… » Puis, me montrant un vaste secrétaire, il ajouta : « Vous ferez brûler ce meuble tel qu’il est, avec tout ce qu’il contient ; j’en ai retiré nos papiers de famille : le reste vous doit être indifférent. Adieu, mon enfant ; j’ai toujours été satisfait de vous. »

Et comme, à travers mes pleurs, je lui parlais de l’éternité de mes regrets si j’avais l’affreux malheur de le perdre, il sourit faiblement, et me dit de sa voix toujours calme et posée :