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CHAPITRE V.

HÉLÈNE.


Je n’ai d’autre but, en me rappelant ces souvenirs d’autrefois, que de me considérer inexorablement de dehors en dedans, si cela se peut dire ; d’assister en spectateur froid et désintéressé aux scènes de ma pensée intime, ainsi qu’à la lutte de mes instincts, bons ou mauvais, et de n’en répudier aucun, tel bas et misérable qu’il soit.

Je crois n’être ni meilleur ni plus mauvais que le commun des autres hommes ; et ce qui me donne l’espèce de courage de tout m’avouer à moi-même, est la conviction où je suis que, si le plus grand nombre se posaient les mêmes questions que je me suis posées, et y répondaient franchement, leurs solutions seraient très-souvent les miennes.

Je reviens à la mort de mon père : ma douleur fut profonde, mais ce sentiment ne fut pas celui qui prédomina en moi : ce fut d’abord une terreur stupéfiante de me voir, à vingt-deux ans, absolument libre, et maître d’une