Page:Sue - Arthur, T2, 1845.djvu/172

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peut ne plus se rencontrer, le hasard est son dieu. J’irai donc demain chez elle. Je vais trouver une excuse pour remettre notre partie d’avenir avec Marguerite chez mademoiselle Lenormand à après-demain. Que prétexter ? une affaire… de notaire ? Non, ce serait une perfidie puérile… Pourtant, que dire ?

Enfin je m’y résigne ; mais je vais par compensation écrire à Marguerite la lettre la plus passionnée.

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J’ai relu cette lettre tout à l’heure écrite par moi à madame de Pënâfiel. Cette lettre est bien, pleine de cœur, de tendresse, de passion, et cela n’est pas feint, c’est vrai, profondément senti, éprouvé. Chose étrange ! et je songe fermement à la tromper, et pourtant jamais peut-être mon amour pour elle n’a été plus vif et plus sincère. Je n’ai aucune raison de me mentir à moi-même, je m’écoute penser… Cela est vrai, j’aime Marguerite plus que je ne l’ai jamais aimée ; naguère j’aurais reculé peut-être devant quelques sacrifices ; à cette heure j’irais au-devant de tous ceux qu’elle me pourrait demander, et pourtant, je le répète, je songe à la tromper !