Page:Sue - Arthur, T2, 1845.djvu/74

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comme si quelque douloureux secret lui eut pesé ; puis parfois c’étaient des traits de bonté et de commisération profondément sentie et raisonnée ; bonté qui ne paraissait pas pour ainsi dire naturelle, instinctive, mais plutôt naître de la comparaison ou du souvenir d’une grande infortune, comme si madame de Pënâfiel se fut dit ; « J’ai tant souffert que je dois m’apitoyer ! »

C’étaient enfin d’autres fois des explosions du mépris le plus acerbe, à propos des envieux et des méchants, qui éclataient en railleries mordantes, n’épargnaient personne, et avaient malheureusement du lui assurer beaucoup d’ennemis.

Une circonstance m’avait aussi singulièrement frappé, c’est que, malgré ce qu’on disait de sa légèreté, je n’avais vu chez madame de Pënâfiel aucun homme sur un pied d’intimité telle, qu’à cette époque on pût lui supposer, ostensiblement du moins, aucun intérêt de cœur.

Si j’aimais madame de Pënâfiel, ce n’était donc pas de cet amour pur, jeune et passionné dont j’avais aimé Hélène ; c’était d’un sentiment ou il entrait au moins autant d’affection que de curiosité, et, le dirai-je, de méfiance ;