Page:Sue - Arthur, T2, 1845.djvu/97

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manteau d’une autre affection la compromettrait tout aussi gravement aux yeux du monde, que si elle affichait la liaison que, selon moi, elle voulait cacher ; puis enfin que le plaisir de rire de chagrins dont j’avais eu le bon sens de ne lui jamais parler, ne valait certes pas la peine d’une dissimulation si longuement et si adroitement combinée ?

Mais lorsqu’il s’agit de folies (et je crois fermement que ma défiance était exaltée jusqu’à la monomanie), les réflexions sages et sensées sont nécessairement celles qui ne nous viennent jamais à l’esprit.

En vain, encore, je m’étais moqué moi-même de ces médisances infâmes, qui de l’incident le plus simple et le plus indifférent en soi parvenaient à construire les imaginations les plus monstrueusement absurdes ; et pourtant, sans réfléchir un instant à l’odieuse inconséquence de mon esprit, j’allais, ce qui était mille fois plus misérable encore que de médire, j’allais calomnier la douleur, chose sainte et sacrée s’il en est ! j’allais abuser d’un secret surpris ! Témoin involontaire d’un de ces grands accès profonds de tristesse intime et cachée, auxquels les âmes souffrantes n’osent s’abandonner que dans la solitude, par une suscep-