Page:Sue - Arthur, T3, 1845.djvu/21

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voyais, si je rencontrais dans Falmouth un ami tendre et dévoué.

C’étaient les longues et intimes causeries de la traversée, heures si favorables aux épanchements et aux confidences ; c’étaient des courses, des fatigues, des périls même à partager en frères, à travers des pays inconnus… confidences, courses, fatigues, périls, qu’il serait si bon de nous rappeler plus tard en nous disant : — Vous souvenez-vous ?… — Douces paroles, doux écho du passé qui fait tressaillir le cœur… Sans doute, me disais-je, la satiété des plaisirs est mauvaise, mais du moins heureusement blasés sont ceux-là qui, rassasiés de toutes les délicatesses de l’existence la plus raffinée, ont le valeureux caprice d’aller retremper leur âme au feu du brûlot de Canaris.

Interprété de la sorte, ce voyage n’était-il pas noble et grand ? n’y avait-il pas quelque chose de touchant, de chevaleresque, dans cette communauté de dangers si fraternellement partagés ?

Lorsque je me laissais naïvement aller à ces impressions, leur bienfaisante influence amollissait mon âme douloureusement tendue ; un baume précieux se répandait sur mes blessures, je me sentais meilleur ; je déplorais encore tris-