Page:Sue - Kernok le pirate, extrait de Le Roman no 697-706, 1880.djvu/51

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Puis le feu communiquant de l’étoupe aux cheveux, des cheveux aux plumes, l’acrobate improvisé, le malheureux Grain-de-Sel, absorba tant de calorique, que sa peau se fendit et craqua sous son enveloppe enflammée.

Pour le coup on riait aux larmes à bord de L’Épervier. Pourtant, comme le mousse poussait des cris affreux, une bonne âme, une âme compatissante, car il y en a partout, le prit et le jeta à la mer en disant :

« Je vais l’éteindre. » Heureusement Grain-de-Sel nageait comme un saumon ; il se plut même à prolonger son bain, qui le rafraîchit beaucoup, se promena autour du brick comme un triton ou une naïade, à votre choix, puis y rentra par le sabord d’arcasse, en disant avec son stoïcisme accoutumé :

« J’aime bien mieux ça que d’être brûlé vif ; mais je me suis tout de même joliment amusé. » On entendit un coup de pistolet ; puis un cri perçant sortit de la chambre de Kernok, Zéli s’y précipita ; c’était un rien, une misère.

Figurez-vous que Kernok, un peu échauffé par le grog, avait beaucoup vanté son adresse à Mélie.

« Je te parie, lui disait-il, que d’un coup de pistolet je te fais sauter le couteau que tu tiens à la main. » Mélie ne doutait pas de l’habileté de son amant ; mais, ne se souciant pas de l’épreuve, elle avait éludé la proposition.

« Lâche, lui avait crié Kernok : eh bien ! pour t’apprendre, je vais t’enlever ton verre » ; et ce disant, il s’était armé d’un pistolet, et le verre de Mélie, brisé