l’empereur, à la joie de toute l’armée, nomma votre père sur le champ de bataille, duc de Ligny et maréchal de France…
— Maréchal de France ! dit Rose étonnée, sans trop comprendre la valeur de ces mots.
— Duc de Ligny ! reprit Blanche aussi surprise.
— Oui, Pierre Simon, fils d’un ouvrier, duc et maréchal ; il faut être roi pour être davantage, reprit Dagobert avec orgueil. Voilà comment l’empereur traitait les enfants du peuple, aussi le peuple était à lui. On avait beau lui dire : « Mais ton empereur fait de toi de la chair à canon. — Bah ! un autre ferait de moi de la chair à misère, répondait le peuple qui n’est pas bête ; j’aime mieux le canon, et risquer de devenir capitaine, colonel, maréchal, roi… ou invalide ; ça vaut mieux encore que de crever de faim, de froid et de vieillesse sur la paille d’un grenier, après avoir travaillé quarante ans pour les autres. »
— Même en France… même à Paris, dans cette belle ville… il y a des malheureux qui meurent de faim et de misère… Dagobert ?
— Même à Paris… Oui, mes enfants ; aussi j’en reviens là… le canon vaut mieux, car on risque, comme votre père, d’être duc et maréchal ; quand je dis duc et maréchal, j’ai raison