Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/145

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d’heure, j’ai pu remonter à cheval. L’avantage nous est encore resté aujourd’hui, malgré bien des pertes. Demain, l’affaire sera décisive, car les feux du bivouac anglais se voient d’ici… Voilà, ma tendre Éva, comment j’ai dû la vie à cet enfant. Heureusement sa blessure ne donne aucune inquiétude ; la balle a dévié et glissé le long des côtes. »

— Ce brave garçon aura dit, comme le général : Blessure blanche, dit Dagobert.

« Maintenant, ma chère Éva, reprit Rose, il faut que tu connaisses, au moins par ce récit, cet intrépide Djalma ; il a dix-huit ans à peine. D’un mot je te peindrai cette noble et vaillante nature ; dans son pays, on donne quelquefois des surnoms ; dès quinze ans, on l’appelait le Généreux, généreux de cœur et d’âme, s’entend ; par une coutume du pays, coutume bizarre et touchante, ce surnom a remonté à son père, que l’on appelle le Père du Généreux, et qui pourrait à bon droit s’appeler le Juste, car ce vieil Indien est un type rare de loyauté chevaleresque, de fière indépendance ; il aurait pu, comme tant d’autres pauvres princes de ce pays, se courber humblement sous l’exécrable despotisme anglais, marchander l’abandon de sa souveraineté et se résigner devant la force. Lui, non. Mon droit tout entier, ou une fosse