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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/164

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Un craquement à la fois strident et saccadé, pareil à celui que font les grands animaux en rongeant un corps dur, s’étant fait entendre dans la cage du lion, Caïn, attira l’attention du Prophète ; laissant le tigre, il fit un pas vers l’autre loge.

De ce lion on ne voyait que la croupe monstrueuse d’un roux jaunâtre ; ses cuisses étaient repliées sous lui, son épaisse crinière cachait entièrement sa tête ; à la tension et aux tressaillements des muscles de ses reins, à la saillie de ses vertèbres, on devinait facilement qu’il faisait de violents efforts avec sa gueule et ses pattes de devant.

Le Prophète, inquiet, s’approcha de la cage, craignant que malgré ses ordres Goliath n’eût donné au lion quelques os à ronger… Pour s’en assurer, il dit d’une voix brève et ferme :

— Caïn !

Caïn ne changea pas de position.

— Caïn… ici ! reprit Morok d’une voix plus haute.

Inutile appel, le lion ne bougea pas et le craquement continua.

— Caïn, ici ! dit une troisième fois le Prophète ; mais, en prononçant ces mots, il appuya le bout de sa tige d’acier brûlante sur la hanche du lion.