Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/163

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vers la cage, fit un pas vers la panthère…

La panthère fit un pas vers le Prophète…

Il s’arrêta…

La Mort s’arrêta.

À ce moment, le tigre Judas, auquel Morok tournait le dos, fit un bond violent dans sa cage, comme s’il eût été jaloux de l’attention que son maître portait à la panthère ; il poussa un grognement rauque, et, levant sa tête, montra le dessous de sa redoutable mâchoire triangulaire et son puissant poitrail d’un blanc sale, où venaient se fondre les tons cuivrés de sa robe fauve rayée de noir ; sa queue, pareille à un gros serpent rougeâtre annelé d’ébène, tantôt se collait à ses flancs, tantôt les battait par un mouvement lent et continu ; ses yeux, d’un vert transparent et lumineux, s’arrêtèrent sur le Prophète.

Telle était l’influence de cet homme sur ses animaux, que Judas cessa presque aussitôt son grondement, comme s’il eût été effrayé de sa témérité ; cependant sa respiration resta haute et bruyante.

Morok se tourna vers lui pendant quelques secondes ; il l’examina très-attentivement.

La panthère, n’étant plus soumise à l’influence du regard de son maître, retourna se tapir dans l’ombre.