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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/288

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à moi, pauvre artisan[1], que de grandeurs, que d’abaissements, que d’obscurité, que d’éclat, que de misères, que de gloire !

« De combien de crimes elle s’est souillée… de combien de vertus elle s’est honorée !

« L’histoire de cette seule famille… c’est l’histoire de l’humanité tout entière !

« Passant à travers tant de générations, par les veines du pauvre et du riche, du souverain et du bandit, du sage et du fou, du lâche et du brave, du saint et de l’athée, le sang de ma sœur s’est perpétué jusqu’à cette heure.

« De cette famille… que reste-t-il aujourd’hui ?

« Sept rejetons :

« Deux orphelines, filles d’une mère proscrite, et d’un père proscrit ;

« Un prince détrôné ;

« Un pauvre prêtre missionnaire ;

« Un homme de condition moyenne ;

  1. On sait que, selon la légende, le Juif errant était un pauvre cordonnier de Jérusalem. Le Christ, portant sa croix, passa devant la maison de l’artisan et lui demanda de se reposer un instant sur un banc de pierre situé près de la porte. — Marche… marche… lui dit durement le juif en le repoussant. — C’est toi qui marcheras jusqu’à la fin des siècles, lui répondit le Christ d’un ton sévère et triste. Voir, pour plus de détails, l’éloquente et savante notice de M. Charles Magnin, placée en tête de la magnifique épopée d’Ahasverus par M. Ed. Quinet).