Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/354

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Et il désigna l’Indien endormi.

— Il le poursuit aussi lorsqu’il est éveillé, dit le nègre, regardant Faringhea d’un air significatif.

— Écoute, dit celui-ci en montrant l’Indien qui, dans l’agitation de son rêve, recommençait à parler d’une voix saccadée ; écoute, le voilà qui répète les réponses de ce voyageur, lorsque nous lui avons proposé de mourir ou de servir avec nous la bonne œuvre… Son esprit est frappé !… toujours frappé.

En effet, l’Indien prononçait tout haut dans son rêve une sorte d’interrogatoire mystérieux dont il faisait tour à tour les demandes et les réponses.

— Voyageur, disait-il d’une voix entrecoupée par de brusques silences, pourquoi cette raie noire sur ton front ? Elle s’étend d’une tempe à l’autre… c’est une marque fatale ; ton regard est triste comme la mort… As-tu été victime ? viens avec nous… Bhowanie venge les victimes. Tu as souffert ? — Oui, beaucoup souffert… — Depuis longtemps ? — Oui, depuis bien longtemps. – Tu souffres encore ? — Toujours. — À qui t’a frappé, que réserves-tu ? — La pitié. — Veux-tu rendre coup pour coup ? — Je veux rendre l’amour pour la haine. — Qui es-tu donc, toi qui rends le bien pour le mal ?