Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/364

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lumières blanches et de grandes ombres bleuâtres sur la masse imposante des ruines ; les étoiles scintillaient au ciel ; de temps à autre, une faible brise faisait bruire les feuilles


    semblables, dès qu’ils n’appartiennent pas à sa communauté, la diminution de l’espèce humaine, voilà l’objet même qu’il poursuit ; ce n’est pas un moyen de fortune ; le butin n’est que l’accessoire, un corollaire fort agréable sans doute, mais secondaire dans son estimation. La destruction, voilà son but, sa mission céleste, sa vocation ; c’est aussi une passion délicieuse à assouvir ; c’est, selon lui, la plus enivrante de toutes les chasses, la chasse à l’homme ! « Vous trouvez un grand plaisir, ai-je entendu dire à un des condamnés, à poursuivre la bête féroce dans sa tanière, à attaquer le sanglier, le tigre, parce qu’il y a des dangers à braver, de l’énergie, du courage à déployer. Songez donc combien cet attrait doit redoubler, quand la lutte est avec l’homme, quand c’est l’homme qu’il faut détruire ! Au lieu de l’exercice d’une seule faculté, le courage, c’est tout à la fois courage, finesse, prévoyance, éloquence, diplomatie : que de ressorts à faire mouvoir ! que de moyens à développer ! Jouer avec toutes les passions, faire vibrer même les cordes de l’amour et de l’amitié pour amener la proie dans vos filets, c’est une chasse sublime, c’est enivrant, c’est un délire, vous dis-je. »

    « Quiconque s’est trouvé dans l’Inde dans les années 1831 et 1832 se rappellera la stupeur et l’effroi que la découverte de cette vaste machine infernale répandit dans toute la société. Un grand nombre de magistrats, d’administrateurs de province se refusèrent à y croire, et ne pouvaient comprendre qu’un système aussi vaste eût si