Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/368

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la leur, quoiqu’ils fussent eux-mêmes deux des chefs les plus éminents de cette sanglante association.

— Oui, tu as raison, frère, s’écria l’Indien partageant l’exaltation de Faringhea, à nous le monde… Ici même, à Java, laissons une trace de notre passage… Avant notre départ, fondons la bonne œuvre dans cette île ;… elle y grandira vite, car ici la misère est grande, les Hollandais sont aussi rapaces que les Anglais… Frère, j’ai vu dans les rivières marécageuses de cette île, toujours mortelles à ceux qui les cultivent, des hommes que le besoin forçait à ce travail homicide ; ils étaient livides comme des cadavres ; quelques-uns, exténués par la maladie, par la fatigue et par la faim, sont tombés pour ne plus se relever… Frère, la bonne œuvre grandira dans ce pays !…

— L’autre soir, dit le métis, j’étais sur le bord du lac, derrière un rocher ; une jeune femme est venue ; quelques lambeaux de couverture entouraient à peine son corps maigre et brûlé par le soleil ; dans ses bras elle tenait un petit enfant qu’elle serrait en pleurant contre son sein tari. Elle a embrassé trois fois cet enfant en disant : « Toi au moins, tu ne seras pas malheureux comme ton père ; » et elle l’a jeté à l’eau ; il a poussé un cri en disparais-