Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/369

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sant… À ce cri, les caïmans cachés dans les roseaux ont joyeusement sauté dans le lac… Frères, ici les mères tuent leurs enfants par pitié… la bonne œuvre grandira dans ce pays.

— Ce matin, dit le nègre, pendant qu’on déchirait un de ses esclaves noirs à coups de fouet, un vieux petit bonhomme, négociant de Batavia, est sorti de sa maison des champs pour regagner la ville. Dans son palanquin, il recevait, avec une indolence blasée, les tristes caresses de deux des jeunes filles dont il peuple son harem en les achetant à leurs familles trop pauvres pour les nourrir. Le palanquin où se tenaient ce petit vieillard et ces jeunes filles était porté par douze hommes jeunes et robustes. Frères, il y a ici des mères qui, par misère, vendent leurs filles, des esclaves que l’on fouaille, des hommes qui portent d’autres hommes comme des bêtes de somme ; la bonne œuvre grandira dans ce pays.

— Dans ce pays… et dans tout pays d’oppression, de misère, de corruption et d’esclavage.

— Puissions-nous donc engager parmi nous Djalma, comme nous l’a conseillé Mahal le contrebandier, dit l’Indien ; notre voyage à Java aurait un double profit ; car, avant de partir, nous compterons parmi les nôtres ce jeune