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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/41

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quittant pas, comme on dit vulgairement, les talons de son maître.

Rien de plus charmant que le groupe des deux jeunes filles.

L’une d’elles tenait de sa main gauche les rênes flottantes, et de son bras droit entourait la taille de sa sœur endormie, dont la tête reposait sur son épaule. Chaque pas du cheval imprimait à ces deux corps souples une ondulation pleine de grâce, et balançait leurs petits pieds appuyés sur une palette de bois servant d’étrier.

Ces deux sœurs jumelles s’appelaient Rose et Blanche, par un doux caprice maternel ; alors elles étaient orphelines, ainsi que le témoignaient leurs tristes vêtements de deuil à demi usés.

D’une ressemblance extrême, d’une taille égale, il fallait une constante habitude de les voir pour distinguer l’une de l’autre. Le portrait de celle qui ne dormait pas pourrait donc servir pour toutes deux ; la seule différence qu’il y eût entre elles en ce moment, c’était que Rose veillait, et remplissait ce jour-là les fonctions d’aînée, fonctions ainsi partagées, grâce à une imagination de leur guide ; vieux soldat de l’empire, fanatique de la discipline, il avait jugé à propos d’alterner ainsi entre les