Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/45

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pelande de gros drap gris, et un bonnet de police bleu à flamme rouge, tombant sur l’épaule gauche, couvrait sa tête chauve.

Autrefois doué d’une force d’Hercule, mais ayant toujours un cœur de lion, bon et patient, parce qu’il était courageux et fort, Dagobert, malgré la rudesse de sa physionomie, se montrait, pour les orphelines, d’une sollicitude exquise, d’une prévenance inouïe, d’une tendresse adorable, presque maternelle… Oui, maternelle ! car pour l’héroïsme de l’affection : cœur de mère, cœur de soldat.

D’un calme stoïque, comprimant toute émotion, l’inaltérable sang-froid de Dagobert ne se démentait jamais ; aussi quoique rien ne fût moins plaisant que lui, il devenait quelquefois d’un comique achevé, en raison même de l’imperturbable sérieux qu’il apportait à toute chose.

De temps à autre, et tout en cheminant, Dagobert se retournait pour donner une caresse ou dire un mot amical au bon cheval blanc qui servait de monture aux orphelines, et dont les salières, les longues dents trahissaient l’âge respectable ; deux profondes cicatrices, l’une au flanc, l’autre au poitrail, prouvaient que ce cheval avait assisté à de chaudes batailles ; aussi n’était-ce pas sans une apparence de fierté qu’il