Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/472

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La femme de Dagobert avait cinquante ans environ ; elle portait une camisole d’indienne bleue à petits bouquets blancs, et un jupon de futaine ; un béguin blanc entourait sa tête, et se nouait sous son menton.

Son visage était pâle et maigre, ses traits réguliers ; sa physionomie exprimait une résignation, une bonté parfaite. On ne pouvait en effet trouver une meilleure, une plus vaillante mère ; sans autre ressource que son travail, elle était parvenue à force d’énergie à élever non-seulement son fils Agricol, mais encore Gabriel, pauvre enfant abandonné, qu’elle avait eu l’admirable courage de prendre à sa charge.

Dans sa jeunesse, elle avait, pour ainsi dire, escompté sa santé à venir pour douze années lucratives, rendues telles par un travail exagéré, écrasant, que de dures privations rendaient presque homicide ; car alors (et c’était un temps de salaire splendide comparé au temps présent), à force de veilles, à force de labeur acharné, Françoise avait quelquefois pu gagner jusqu’à cinquante sous par jour, avec lesquels elle était parvenue à élever son fils et son enfant adoptif…

Au bout de ces douze années, sa santé fut ruinée, ses forces presque à bout ; mais au moins les deux enfants n’avaient manqué de