Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/484

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sédé de tout droit au sol, et qu’il naît avec ses bras pour seul patrimoine.

Le sauvage ne jouit pas des avantages de la civilisation, mais du moins il a pour se nourrir les animaux des forêts, les oiseaux de l’air, le poisson des rivières, les fruits de la terre, et, pour s’abriter et se chauffer, les arbres des grands bois.

Le civilisé, déshérité de ces dons de Dieu, le civilisé, qui regarde la propriété comme sainte et sacrée, peut donc en retour de son rude labeur quotidien qui enrichit le pays, peut donc demander un salaire suffisant pour vivre sainement, rien de plus, rien de moins.

Car est-ce vivre, que de se traîner sans cesse sur cette limite extrême qui sépare la vie de la tombe, et d’y lutter contre le froid, la faim, la maladie ?

Et pour montrer jusqu’où peut aller cette mortification que la société impose inexorablement à des milliers d’êtres honnêtes et laborieux, par son impitoyable insouciance de toutes les questions qui touchent à une juste rémunération du travail, nous allons constater de quelle façon une pauvre jeune fille peut exister avec quatre francs par semaine.

Peut-être alors saura-t-on du moins gré à tant d’infortunées créatures de supporter avec