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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/508

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— Oh ! ce que je t’en disais, c’était pour la forme, car tu as tes manies, et pour rien au monde tu ne mangerais avec nous… C’est comme ma mère, elle préfère dîner toute seule ;… de cette manière-là elle se prive sans que je le sache…

— Mais, mon Dieu, non, mon cher enfant… c’est que cela convient mieux à ma santé… de dîner de très-bonne heure… Eh bien ! trouves-tu cela bon ?

— Bon ?… mais dites donc excellent… c’est de la merluche aux navets… et je suis fou de la merluche ; j’étais né pour être pêcheur à Terre-Neuve.

Le digne garçon trouvait au contraire assez peu restaurant, après une rude journée de travail, ce fade ragoût qui avait même quelque peu brûlé pendant son récit, mais il savait rendre sa mère si contente en faisant maigre sans trop se plaindre, qu’il eut l’air de savourer ce poisson avec sensualité ; aussi la bonne femme ajouta d’un air satisfait :

— Oh !… on voit bien que tu t’en régales, mon cher enfant : vendredi et samedi prochain je t’en ferai encore.

— Bien, merci, ma mère… seulement, n’en faites pas deux jours de suite, je me blaserais… Ah çà ! maintenant, parlons de ce que nous