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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/543

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N’es-tu pas maintenant leur seule ressource ?… Songes-y donc ; sans toi, sans ton travail, que deviendraient-ils ?

— En effet… ce serait terrible, dit Agricol en jetant la lettre sur la table ; ce que tu me dis de Remi est juste… Il était aussi innocent que moi ; une erreur de justice… erreur involontaire, sans doute, n’en est pas moins cruelle… Mais encore une fois… on n’arrête pas un homme sans l’entendre.

— On l’arrête d’abord… ensuite on l’entend, dit la Mayeux avec amertume ; puis, au bout d’un mois ou deux, on lui rend sa liberté… et… s’il a une femme, des enfants qui n’ont pour vivre que son travail quotidien… que font-ils pendant que leur seul soutien est en prison ?… ils ont faim, ils ont froid… et ils pleurent.

À ces simples et touchantes paroles de la Mayeux, Agricol tressaillit.

— Un mois sans travail !… reprit-il d’un air triste et pensif. Et ma mère… et mon père… et ces deux jeunes filles qui font partie de notre famille jusqu’à ce que le maréchal Simon ou son père soient arrivés à Paris !… Ah ! tu as raison, malgré moi, cette pensée m’effraye…

— Agricol, s’écria tout à coup la Mayeux, si tu t’adressais à M. Hardy, il est si bon, son ca-