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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/563

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glorieuses que les nôtres… à nous autres, batailleurs de profession…

— Oui… mon père dit vrai, s’écria Agricol.

Et il ajouta avec exaltation :

— Ah !… voilà les prêtres comme je les aime, comme je les vénère ; charité, courage, résignation !

— Je vous en prie… ne me vantez pas ainsi…, dit Gabriel avec embarras.

— Te vanter !… reprit Dagobert, ah çà ! voyons… quand j’allais au feu, moi, est-ce que j’y allais seul ? est-ce que mon capitaine ne me voyait pas ? est-ce que mes camarades n’étaient pas là ?… est-ce qu’à défaut de vrai courage, je n’aurais pas eu l’amour-propre… pour m’éperonner ? sans compter les cris de la bataille, l’odeur de la poudre, les fanfares des trompettes, le bruit du canon, l’ardeur de mon cheval qui me bondissait entre les jambes, le diable et son train, quoi ! sans compter enfin que je sentais l’empereur là, qui, pour ma peau hardiment trouée, me donnerait un bout de galon ou de ruban pour compresse… Grâce à tout cela, je passais pour crâne… bon ;… mais n’es-tu pas mille fois plus crâne que moi, toi, mon brave enfant, toi qui t’en vas tout seul… désarmé… affronter des ennemis cent fois plus féroces que ceux que nous n’abordions, nous