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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/621

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prends… Tenez… vous avez un noble cœur ; la Mayeux avait raison…

— La Mayeux ? dit Adrienne en regardant Agricol d’un air très-surpris ; car ces mots pour elle étaient une énigme.

L’ouvrier, qui ne rougissait pas de ses amis, reprit bravement :

— Mademoiselle, je vais vous expliquer cela. La Mayeux est une pauvre jeune ouvrière bien laborieuse avec qui j’ai été élevé ; elle est contrefaite, voilà pourquoi on l’appelle la Mayeux. Vous voyez donc que d’un côté elle est placée aussi bas que vous êtes placée haut. Mais pour le cœur… pour la délicatesse… ah ! mademoiselle… je suis sûr que vous la valez… Ç’a été tout de suite sa pensée, lorsque je lui ai raconté comment hier vous m’aviez donné cette belle fleur…

— Je vous assure, monsieur, dit Adrienne touchée, que cette comparaison me flatte et m’honore plus que tout ce que vous pourriez me dire… Un cœur qui reste bon et délicat, malgré de cruelles infortunes, est un si rare trésor !… Il est si facile d’être bon, quand on a la jeunesse et la beauté ! d’être délicat et généreux, quand on a la richesse ! J’accepte donc votre comparaison ;… mais à condition que vous me mettiez bien vite à même