Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/64

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après avoir conduit son cheval à l’écurie, a demandé un baquet, de l’eau ; il s’est établi sous le porche, et, à la clarté de la lanterne… il savonne… Un homme à moustaches grises… savonner comme une lavandière, c’est comme si je donnais du millet à des serins, ajouta Goliath en haussant les épaules avec mépris. Maintenant que j’ai répondu, maître, laissez-moi m’occuper du souper des bêtes.

Puis cherchant quelque chose des yeux, il ajouta :

— Mais où est donc ce couperet ?

Après un moment de silence méditatif, le Prophète dit à Goliath :

— Tu ne donneras pas à manger aux bêtes ce soir.

D’abord Goliath ne comprit pas, tant cette idée était en effet incompréhensible pour lui.

— Plaît-il, maître ? dit-il.

— Je te défends de donner à manger aux bêtes ce soir.

Goliath ne répondit rien, ouvrit ses yeux louches d’une grandeur démesurée, joignit les mains, et recula de deux pas.

— Ah çà ! m’entends-tu ? dit Morok avec impatience. Est-ce clair ?

— Ne pas manger ? quand notre viande est là, quand notre souper est déjà en retard de