Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/178

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est loyale, vous le savez… Vous n’aurez donc plus aucun intérêt à me retenir ici… Si, au contraire, vous croyez sincèrement ma raison en danger, et, je vous l’avoue, vous avez éveillé dans mon esprit des doutes vagues, mais effrayants… alors, dites-le-moi, je vous croirai… je suis seule, à votre merci, sans amis, sans conseil… Eh bien ! je me confie aveuglément à vous… Est-ce mon sauveur ou mon bourreau que j’implore ?… je ne sais pas… mais je lui dis… : « Voilà mon avenir… voilà ma vie… prenez… je n’ai plus la force de vous la disputer… »

Ces touchantes paroles, d’une résignation navrante, d’une confiance désespérée, portèrent le dernier coup aux indécisions de M. Baleinier.

Déjà cruellement ému de cette scène, sans réfléchir aux conséquences de ce qu’il allait faire, il voulut du moins rassurer Adrienne sur les terribles et injustes craintes qu’il avait su éveiller en elle. Les sentiments de repentir et de bienveillance qui animaient M. Baleinier se lisaient sur sa physionomie.

Ils s’y lisaient trop…

Au moment où il s’approchait de mademoiselle de Cardoville pour lui prendre la main, une petite voix tranchante et aiguë se fit entendre derrière le guichet et prononça ces seuls mots :