Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/251

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du devoir évangélique, avait encore à se dévouer, à être utile, et elle en trouvait la force. Les créatures les plus frêles, les plus chétives, sont parfois douées d’une vigueur d’âme extraordinaire ; on dirait que chez ces organisations physiquement infirmes et débiles, l’esprit domine assez le corps pour lui imprimer une énergie factice.

Ainsi la Mayeux, depuis vingt-quatre heures, n’avait ni mangé, ni dormi ; elle avait souffert du froid pendant une nuit glacée. Le matin elle avait enduré de violentes fatigues en traversant Paris deux fois par la pluie et par la neige pour aller rue de Babylone, et pourtant ses forces n’étaient pas à bout, tant la puissance du cœur est immense.

La Mayeux venait d’arriver au coin de la rue Saint-Merry.

Depuis le récent complot de la rue des Prouvaires, on avait mis en observation dans ce quartier populeux un plus grand nombre d’agents de police et de sergents de ville que l’on n’en met ordinairement.

La jeune ouvrière, bien qu’elle courbât sous le poids de son paquet, courait presque en longeant le trottoir ; au moment où elle passait auprès d’un sergent de ville, deux pièces de cinq francs tombèrent derrière elle jetées sur ses