Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/288

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qu’à toi… et ne les confier à personne ?… Il faut que ces enfants t’aient bien instamment demandé de s’aller promener. Elles savaient que j’allais rentrer d’un moment à l’autre ; comment ne m’ont-elles pas attendu, hein ! Françoise ?… Je te demande pourquoi elles ne m’ont pas attendu ? Mais réponds-moi donc… mordieu ! tu ferais damner un saint !… s’écria Dagobert en frappant du pied, réponds-moi donc…

Le courage de Françoise était à bout ; ces interrogations pressantes, réitérées, qui devaient aboutir à la découverte de la vérité, lui faisaient endurer mille tortures lentes et poignantes. Elle préféra en finir tout d’un coup ; elle se décida donc à supporter le poids de la colère de son mari en victime humble et résignée, mais opiniâtrement fidèle à la promesse qu’elle avait jurée devant Dieu à son confesseur.

N’ayant pas la force de se lever, elle baissa la tête, et, laissant tomber ses bras de chaque côté de sa chaise, elle dit à son mari d’une voix accablée :

— Fais de moi ce que tu voudras… mais ne me demande plus ce que sont devenues ces enfants… je ne pourrais pas te répondre…

La foudre serait tombée aux pieds du soldat