Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/523

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le forgeron, après un moment d’hésitation, reprit d’une voix émue :

— Je te connais trop, mon père, pour songer à t’arrêter par la peur d’un danger de mort.

— De quel danger parles-tu alors ?

— D’un danger… devant lequel tu reculeras ;… oui… devant lequel tu reculeras… toi si brave…, dit le jeune homme d’un ton pénétré qui frappa son père.

— Agricol, dit sévèrement et rudement le soldat, vous dites une lâcheté, vous me faites une insulte.

— Mon père !

— Une lâcheté, reprit le soldat courroucé, parce qu’il est lâche de vouloir détourner un homme de son devoir en l’effrayant ; une insulte, parce que vous me croyez capable d’être intimidé.

— Ah ! M. Dagobert, s’écria la Mayeux, vous ne comprenez pas Agricol…

— Je le comprends trop, répondit durement le soldat.

Douloureusement ému de la sévérité de son père, mais ferme dans sa résolution dictée par son amour et par son respect, Agricol reprit, non sans un violent battement de cœur :

— Pardonnez-moi si je vous désobéis, mon père ;… mais dussiez-vous me haïr, vous sau-