Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/588

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J’ai étranglé le contrebandier, j’ai pris la lettre, j’ai fait la traversée… et me voici…

L’étrangleur avait prononcé ces mots avec une jactance farouche ; son regard fauve et intrépide ne s’abaissa pas devant le regard perçant de Rodin, qui, à cet étrange aveu, avait redressé vivement la tête pour observer ce personnage.

Faringhea croyait étonner ou intimider Rodin par cette espèce de forfanterie féroce ; mais, à sa grande surprise, le socius, toujours impassible comme un cadavre, lui dit simplement :

— Ah !… on étrangle ainsi… à Java ?

— Et ailleurs… aussi…, répondit Faringhea avec un sourire amer.

— Je ne veux pas vous croire ;… mais je vous trouve d’une étonnante sincérité, monsieur… Votre nom ?…

— Faringhea.

— Eh bien, M. Faringhea, où voulez-vous en venir ?… Vous vous êtes emparé, par un crime abominable, d’une lettre à moi adressée ; maintenant vous hésitez à me la remettre…

— Parce que je l’ai lue… et qu’elle peut me servir.

— Ah !… vous l’avez lue ? dit Rodin un instant troublé.

Puis il reprit :