Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/162

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— Mais c’est énorme… mais c’est presque ce que vous espériez, s’écria la princesse ; alors, pourquoi vous désespérer ?

— Parce que Gabriel plaidera contre cette donation ; si légale qu’elle soit, il trouvera moyen de la faire annuler maintenant que le voilà libre, éclairé sur nous, et entouré de sa famille adoptive ; je vous dis que tout est perdu ; il ne reste aucun espoir. Je crois même prudent d’écrire à Rome pour obtenir la permission de quitter Paris pendant quelque temps. Cette ville m’est odieuse.

— Oh ! oui, je le vois… il faut qu’il n’y ait plus d’espoir… pour que vous, mon ami… vous vous décidiez presque à fuir…

Et le père d’Aigrigny restait complètement anéanti, démoralisé ; ce coup terrible avait brisé en lui tout ressort, toute énergie ; il se jeta dans un fauteuil avec accablement.

Pendant l’entretien précédent, Rodin était modestement resté debout auprès de la porte, tenant son vieux chapeau à la main.

Deux ou trois fois, à certains passages de la conversation du père d’Aigrigny et de la princesse, la face cadavéreuse du socius, qui paraissait en proie à un courroux concentré, s’était légèrement colorée, ses flasques paupières étaient devenues rouges comme si le sang lui eût monté