Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/440

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beau que vous m’avez destiné ? Qui vous a dit encore que, sans envier l’élégance des charmantes créatures qui vous entourent et que j’aime déjà parce qu’elles vous aiment, je me sentirais toujours, par une comparaison involontaire, embarrassée, honteuse devant elles ? Qui vous a dit cela, pour que vous ayez toujours songé à les éloigner quand vous m’appeliez ici, mademoiselle ?… Oui, qui vous a enfin révélé toutes les pénibles et secrètes susceptibilités d’une position exceptionnelle comme la mienne ? Qui vous les a révélées ? Dieu, sans doute, lui qui, dans sa grandeur infinie, pourvoit à la création des mondes, et qui sait aussi paternellement s’occuper du pauvre petit insecte caché dans l’herbe… Et vous ne voulez pas que la reconnaissance d’un cœur que vous devinez si bien s’élève à son tour jusqu’à la divination de ce qui peut vous nuire ? Non, non, mademoiselle, les uns ont l’instinct de leur propre conservation ; d’autres, plus heureux, ont l’instinct de la conservation de ceux qu’ils chérissent… Cet instinct, Dieu me l’a donné… On vous trahit, vous dis-je… on vous trahit !…

Et la Mayeux, le regard animé, les joues légèrement colorées par l’émotion, accentua si énergiquement ces derniers mots, les accom-