Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/530

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trueuse, ce n’est jamais volontairement qu’il fait le mal.

« Voilà ce que j’ai vu tout à l’heure, je n’attends pas à ce soir pour l’écrire ; cela, pour ainsi dire, refroidirait dans mon cœur.

« J’étais allée porter de l’ouvrage pressé ; je passais sur la place du Temple ; à quelques pas devant moi, un enfant de douze ans au plus, tête et pieds nus malgré le froid, vêtu d’un pantalon et d’un mauvais bourgeron en lambeaux, conduisait par la bride un grand et gros cheval de charrette, dételé, mais portant son harnais ; … de temps à autre, le cheval s’arrêtait court, refusant d’avancer ;… l’enfant, n’ayant pas de fouet pour le forcer de marcher, le tirait en vain par sa bride ; le cheval restait immobile… Alors le pauvre petit s’écriait : « Ô mon Dieu !… mon Dieu ! » et pleurait à chaudes larmes… en regardant autour de lui pour implorer quelque secours des passants.

« Sa chère petite figure était empreinte d’une douleur si navrante, que, sans réfléchir, j’entrepris une chose dont je ne puis maintenant m’empêcher de sourire, car je devais offrir un spectacle bien grotesque.

« J’ai une peur horrible des chevaux, et j’ai encore plus peur de me mettre en évidence. Il