Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/599

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— Supposez, mademoiselle, que M. Hardy, au lieu d’être ce qu’il est, eût été seulement un spéculateur au cœur sec, ne connaissant que le produit, se disant : « Pour que ma fabrique me rapporte beaucoup, que faut-il ? main-d’œuvre parfaite, grande économie de matières premières, parfait emploi du temps des ouvriers ; en un mot, économie de fabrication, afin de produire à très-bon marché ; excellence des produits, afin de vendre très-cher… »

— Certainement, M. Agricol, un fabricant ne peut exiger davantage.

— Eh bien ! mademoiselle, ces exigences eussent été satisfaites… ainsi qu’elles l’ont été ;… mais comment ? Le voici : M. Hardy, seulement spéculateur, se serait d’abord dit : « Éloignés de ma fabrique, mes ouvriers, pour s’y rendre, peineront ; se levant plus tôt, ils dormiront moins ; prendre sur le sommeil si nécessaire aux travailleurs ? mauvais calcul ; ils s’affaiblissent, l’ouvrage s’en ressent ; puis l’intempérie des saisons empirera cette longue course ; l’ouvrier arrivera mouillé, frissonnant de froid, énervé avant le travail, et alors… quel travail ! »

— Cela est malheureusement vrai, M. Agricol ; quand à Lille j’arrivais toute mouillée d’une pluie froide à la manufacture, j’en trem-