Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/68

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— Ce patrimoine, mon cher fils, peut être minime, comme il peut être… considérable.

— Eh ! mon père, il s’agirait d’une fortune de roi, s’écria Gabriel avec une noble et fière indifférence, que je ne parlerais pas autrement, et j’ai, je crois, le droit d’être cru ; voici donc ma résolution bien arrêtée : la compagnie à laquelle j’appartiens court des dangers, dites-vous ? je me convaincrai de ces dangers : s’ils sont menaçants… fort maintenant de ma détermination qui, moralement, me sépare de vous, mon père, j’attendrai pour vous quitter la fin de vos périls. Quant à cet héritage dont on me croit si avide, je vous l’abandonne formellement, mon père, ainsi que je m’y suis autrefois librement engagé ; tout mon désir est que ces biens soient employés au soulagement des pauvres… J’ignore quelle est cette fortune ; mais, petite ou grande, elle appartient à la compagnie, parce que je n’ai qu’une parole… Je vous l’ai dit, mon père, mon seul désir est d’obtenir une modeste cure dans quelque pauvre village… oui… pauvre surtout… parce que là mes services seront plus utiles. Ainsi, mon père, lorsqu’un homme qui n’a jamais menti de sa vie, affirme qu’il ne soupire qu’après une existence aussi humble, aussi désintéressée, on doit, je crois, le regarder comme