Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/136

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour la guerre, le sang de Djalma bouillonna dans ses veines ; ses yeux étincelèrent d’une ardeur farouche ; la tête un peu penchée en avant, les deux mains crispées sur le rebord de la loge, tout son corps frémissait d’un tremblement convulsif. Les spectateurs, le théâtre, Adrienne, n’existaient plus pour lui : il était dans une forêt de son pays… et il sentait le tigre…

Il se mêlait alors à sa beauté une expression si intrépide, si farouche, que Rose-Pompon le contemplait avec une sorte de frayeur et d’admiration passionnée. Pour la première fois de sa vie, peut-être, ses jolis yeux bleus, ordinairement si gais, si malins, peignaient une émotion sérieuse ; elle ne pouvait se rendre compte de ce qu’elle ressentait. Son cœur se serrait, battait avec force, comme si quelque malheur allait arriver…

Cédant à un mouvement de crainte involontaire elle saisit le bras de Djalma et lui dit :

— Ne regardez donc pas ainsi cette caverne, vous me faites peur…

Le prince ne l’entendit pas.

— Ah ! le voilà… le voilà ! murmura la foule presque tout d’une voix.

Morok paraissait au fond du théâtre…

Morok, costumé comme nous l’avons dépeint,