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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/273

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que la marchande, pâle et épouvantée, ne songeait pas à lui rendre…

— Brigand !… s’écria l’un des buveurs avec tant de violence que plusieurs passants s’arrêtèrent, on te rendra ta monnaie quand tu auras dit ce que tu as jeté dans ce broc !

— Comment ? il a jeté quelque chose dans un broc ? dit un passant.

— C’est peut-être un empoisonneur, reprit un autre.

— Il faudrait alors l’arrêter… ajouta un troisième.

— Oui, oui, dirent les buveurs, honnêtes gens peut-être, mais subissant l’influence de la panique générale ; oui, il faut l’arrêter… on l’a surpris jetant du poison dans un des brocs du comptoir.

Ces mots : c’est un empoisonneur ! circulèrent aussitôt dans le groupe qui, d’abord formé de trois ou quatre personnes, grossissait à chaque instant à la porte du marchand de vins ; de sourdes et menaçantes clameurs commencèrent à s’élever ; le buveur accusateur, voyant ainsi ses craintes partagées et presque justifiées, crut faire acte de bon et courageux citoyen, en prenant Goliath au collet et lui disant :

— Viens t’expliquer au corps de garde, brigand !