Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/280

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stant de lassitude de ses bourreaux qui le croyaient achevé, parvint, par un de ces soubresauts convulsifs fréquents dans l’agonie, à se dresser sur ses jambes pendant quelques secondes ; alors aveuglé par ses blessures, agitant ses bras dans le vide comme pour parer des coups qu’on ne lui portait pas, il murmura ces mots qui sortirent de sa bouche avec des flots de sang :

— Grâce… je n’ai pas empoisonné… grâce !

Cette sorte de résurrection produisit un effet si saisissant sur la foule, qu’un instant elle se recula avec effroi ; les clameurs cessèrent, on laissa un peu d’espace autour de la victime ;… quelques cœurs commençaient même à s’apitoyer, lorsque le carrier, voyant Goliath, aveuglé par le sang, étendre devant lui ses mains çà et là, fit une allusion féroce à un jeu connu et s’écria :

— Casse-cou !

Puis, d’un violent coup de pied dans le ventre, il renversa de nouveau la victime dont la tête rebondit deux fois sur le pavé…

Au moment où le géant tomba, une voix dans la foule s’écria :

— C’est Goliath !… Arrêtez !… ce malheureux est innocent.

Et le père d’Aigrigny, c’était lui, cédant à