Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/304

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et seule barrière qui défendît le père d’Aigrigny.

Pendant cette manœuvre, le carrier, Ciboule et d’autres s’avancèrent droit vers Gabriel, en criant avec une joie féroce :

— Cette fois, nous le tenons… À mort l’empoisonneur !

Pour sauver le père d’Aigrigny, Gabriel se fût laissé massacrer à la porte de la grille ; mais plus loin, cette grille, haute de quatre pieds au plus, allait être en un instant abattue ou escaladée.

Le missionnaire perdit tout espoir d’arracher le jésuite à une mort affreuse… Pourtant il s’écria :

— Arrêtez !… pauvres insensés…

Et il se jeta au-devant de la foule en étendant les mains vers elle.

Son cri, son geste, sa physionomie, exprimèrent une autorité à la fois si tendre et si fraternelle, qu’il y eut un moment d’hésitation dans la foule ; mais à cette hésitation succédèrent bientôt ces cris de plus en plus furieux :

— À mort ! à mort !

— Vous voulez sa mort ?… dit Gabriel en pâlissant encore.

— Oui !… oui !…

— Eh bien ! qu’il meure…, s’écria le mission-