Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/307

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ce disant, le misérable, l’œil sanglant, la joue enflammée, s’avança à la tête d’un groupe résolu, et, marchant en avant, il fit un geste comme s’il eût voulu repousser et écarter de son passage Gabriel, debout et toujours en avant de la grille.

Mais, au lieu de résister au bandit, le missionnaire fit vivement deux pas à sa rencontre, le prit par le bras, et lui dit d’une voix ferme :

— Venez…

Et entraînant pour ainsi dire à sa suite le carrier stupéfait, que ses compagnons abasourdis par ce nouvel incident n’osèrent suivre tout d’abord… Gabriel parcourut rapidement l’espace qui le séparait du chœur, en ouvrit la grille, et amenant le carrier, qu’il tenait toujours par le bras, jusqu’au corps du père d’Aigrigny étendu sur les dalles, il s’écria :

— Voici la victime  ;… elle est condamnée… frappez-la !…

— Moi ! s’écria le carrier en hésitant, moi… tout seul…

— Oh ! reprit Gabriel avec amertume, il n’y a aucun danger, vous l’achèverez facilement ;… voyez… il est anéanti par la souffrance… il lui reste à peine un souffle de vie… il ne fera aucune résistance… Ne craignez rien !

Le carrier restait immobile, pendant que la