Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/363

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— Je ne nierai rien, articula péniblement Rodin ; mais laissez-moi en repos.

— Enfin, Dieu vous inspire, dit le cardinal avec un sourire de satisfaction.

Et croyant toucher à son but, il reprit :

— Écoutez la voix du Seigneur ; elle vous guidera sûrement, mon cher père ; ainsi vous ne niez rien ?

— J’avais… le délire… je… ne… puis… donc… nier… (Oh ! que je souffre ! ajouta Rodin en forme de parenthèse.) Je ne puis donc nier… les folies que j’aurais dites… pendant… mon délire…

— Mais quand ces prétendues folies sont d’accord avec la réalité, s’écria le prélat, furieux d’être de nouveau trompé dans son attente, mais quand le délire est une révélation involontaire… providentielle…

— Cardinal Malipieri… votre ruse… n’est pas même… à la hauteur… de mon agonie, reprit Rodin d’une voix éteinte. La preuve que je n’ai pas dit mon secret… si j’ai un secret… c’est que vous voudriez… me… le faire dire…

Et le jésuite, malgré ses douleurs, malgré sa faiblesse croissante, eut la force de se lever à demi sur son lit, de regarder le prélat bien en face et de le narguer par un sourire d’une ironie diabolique.