Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/434

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Et tant de déplorables infortunes sont-elles au moins quelquefois allégées par une lointaine espérance d’un avenir meilleur ? Hélas ! on n’ose le croire…

Supposons qu’un homme sincère, sans aigreur, sans passion, sans amertume, sans violence, mais le cœur douloureusement navré de tant de misères, vienne simplement poser cette question à nos législateurs :

« Il résulte de faits évidents, prouvés, irrécusables, que des milliers de femmes sont obligées de vivre à Paris avec au plus cinq francs par semaine… entendez-vous bien : cinq francs par semaine… pour se loger, se vêtir, se chauffer, se nourrir. Et beaucoup de ces femmes sont veuves et ont de petits enfants. Je ne ferai pas, comme on dit, de phrases ; je vous conjure seulement de penser à vos filles, à vos sœurs, à vos femmes, à vos mères… Comme elles, pourtant, ces milliers de pauvres créatures, vouées à un sort affreux et forcément démoralisateur, sont mères, filles, sœurs, épouses. Je vous le demande au nom de la charité, au nom du bon sens, au nom de l’intérêt de tous, au nom de la dignité humaine, un tel état de choses, qui va d’ailleurs toujours s’aggravant, est-il tolérable ? est-il possible ? Le souffrirez-vous, surtout si vous songez aux maux effroyables, aux vices