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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/467

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les distances… Et souvent ces heureux du monde, que l’on envie tant, tombent, par d’affreuses douleurs, hélas ! bien au-dessous des plus humbles et des plus misérables, puisqu’à ceux-là ils demandent pitié… consolation.

Puis essuyant ses larmes, qui coulaient abondamment, mademoiselle de Cardoville reprit d’une voix émue :

— Allons, sœur, courage, courage… aimons-nous, soutenons-nous ; que ce triste et mystérieux lien nous unisse à jamais.

— Ah ! mademoiselle, pardonnez-moi. Mais maintenant que vous savez le secret de ma vie, dit la Mayeux en baissant les yeux et ne pouvant vaincre sa confusion, il me semble que je ne pourrai plus vous regarder sans rougir.

— Pourquoi ? parce que vous aimez passionnément M. Agricol ? dit Adrienne ; mais alors il faudra donc que je meure de honte à vos yeux, car, moins courageuse que vous, je n’ai pas eu la force de souffrir, de me résigner, de cacher mon amour au plus profond de mon cœur ! Celui que j’aime, d’un amour désormais impossible, l’a connu, cet amour… et il l’a méprisé… pour me préférer une femme dont le choix seul serait un nouvel et sanglant affront pour moi… si les apparences ne me trompent pas sur elle… Aussi, quelquefois,