Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/228

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tient un plat ; dans ce plat est une tête… cette tête est la sienne.

C’est la statue de saint Jean, martyr, mis à mort par ordre d’Hérodiade.

Le silence est solennel.

De temps à autre on entend seulement le sourd bruissement du branchage des pins énormes que la brise agite.

Des nuages cuivrés, rougis par le couchant, voguent lentement au-dessus de la forêt, et se reflètent dans le courant d’un petit ruisseau d’eau vive, qui, traversant les ruines de l’abbaye, prend sa source plus loin, au milieu d’une masse de roches.

L’onde coule, les nuages passent, les arbres séculaires frémissent, la brise murmure…

Soudain, à travers la pénombre formée par la cime épaisse de cette futaie, dont les innombrables troncs se perdent dans des profondeurs infinies… apparaît une forme humaine…

C’est une femme.

Elle s’avance lentement vers les ruines… elle les atteint… elle foule ce sol autrefois béni…

Cette femme est pâle, son regard est triste, sa longue robe flottante et ses pieds sont poudreux ; sa démarche est pénible, chancelante.

Un bloc de pierre est placé au bord de la