Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/23

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n’avez-vous pas reçu une lettre que je vous ai écrite le matin même du jour où je vous ai vu au théâtre ?

Djalma ne répondit rien ; un sombre nuage passa rapidement sur ses beaux traits, et, pendant une seconde, ils prirent une expression si menaçante, qu’Adrienne en fut effrayée. Mais bientôt cette violente agitation s’apaisa comme par réflexion ; le front de Djalma redevint calme et serein.

— J’ai été plus clément que je ne le pensais, dit le prince à Adrienne, qui le contemplait avec étonnement. J’ai voulu venir près de vous… digne de vous… ma cousine. J’ai pardonné à celui qui, pour servir mes ennemis, m’avait donné, me donnait encore de funestes conseils… Cet homme, j’en suis certain, m’a dérobé votre lettre… Tout à l’heure, en pensant à tous les maux qu’il m’a ainsi causés, j’ai un instant regretté ma clémence… Mais j’ai pensé à votre lettre d’hier… et ma colère s’est évanouie.

— C’en est donc fait de ce passé funeste, de ces craintes, de ces défiances, de ces soupçons, qui nous ont tourmentés si longtemps, qui ont fait que j’ai douté de vous et que vous avez douté de moi. Oh ! oui, loin de nous ce passé funeste ! s’écria mademoiselle de Cardoville avec une joie profonde.