Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/286

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Ce peu de mots rappelaient à Dagobert et aux jeunes filles les services que Rodin leur avait véritablement rendus ; quoique le maréchal eût entendu parler de Rodin par mademoiselle de Cardoville comme d’un homme fort dangereux, dont elle avait été dupe, le père de Rose et de Blanche, sans cesse tourmenté, harcelé, n’avait pas fait part de cette circonstance à Dagobert ; mais celui-ci, instruit par l’expérience, et malgré tant d’apparences favorables au jésuite, éprouvait à son endroit un éloignement insurmontable ; aussi reprit-il brusquement :

— Il ne s’agit pas de savoir si j’ai le poignet rude ou non, mais…

— Si je fais allusion à cette innocente vivacité de votre part, mon cher monsieur, dit Rodin d’un ton doucereux en interrompant Dagobert et se rapprochant davantage des deux sœurs par une sorte de circonlocution de reptile qui lui était particulière, si j’y fais allusion, c’est en me souvenant involontairement des petits services que j’ai été trop heureux de vous rendre.

Dagobert regarda fixement Rodin, qui aussitôt abaissa sur sa prunelle fauve sa flasque paupière.

— D’abord, dit le soldat après un moment de