Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/381

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inconnue, cher prince… le nom de la vôtre est dans toutes les bouches.

Et comme à ces paroles imprévues, effrayantes, Adrienne, Djalma et la Mayeux, quoique obéissant à des ressentiments divers, restèrent un moment muets de surprise, la princesse, ne jugeant plus nécessaire de contenir et sa joie infernale et sa haine triomphante, s’écria en se levant, les joues enflammées, les yeux étincelants, s’adressant à Adrienne :

— Oui, je vous défie de me démentir ; a-t-on été forcé de vous enfermer sous prétexte de folie ? a-t-on, oui ou non, trouvé cet artisan… votre amant d’alors, caché dans votre chambre à coucher ?

À cette horrible accusation, le teint de Djalma, transparent et doré comme de l’ambre, devint subitement mat et couleur de plomb ; ses yeux, fixes, grands ouverts, se cerclèrent de blanc ; sa lèvre supérieure, rouge comme du sang, se relevant par une sorte de rictus sauvage, laissa voir ses petites dents blanches convulsivement serrées ; enfin sa physionomie devint à ce moment si épouvantablement menaçante et féroce, que la Mayeux frissonna d’effroi.

Le jeune Indien, emporté par l’ardeur, par la violence du sang, éprouvait un vertige de rage