Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/468

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core reposait si heureuse dans cette chambre ;… je l’ai tuée. Maintenant qu’elle est morte, que me fait sa trahison ?… Je ne devais pas la tuer pour cela… Elle m’avait trahi… elle aimait cet homme que j’ai aussi frappé ;… elle l’aimait… C’est qu’hélas ! je n’avais pas su me faire préférer, ajouta-t-il avec une résignation pleine d’attendrissement et de remords. Moi, pauvre enfant, à demi barbare… en quoi pouvais-je mériter son cœur ?… quels droits ?… quel charme ? Elle ne m’aimait pas ? c’était ma faute… et elle, toujours généreuse, me cachait son indifférence sous des dehors d’affection… pour ne pas me rendre trop malheureux ;… et pour cela je l’ai tuée… Son crime, où est-il ? n’était-elle pas venue librement à moi ?… ne m’avait-elle pas ouvert sa demeure ? ne m’avait-elle pas permis de passer des jours près d’elle… seul avec elle ?… Sans doute… elle voulait m’aimer et elle n’a pas pu… Moi, je l’aimais de toutes les forces de mon âme ;… mais mon amour n’était pas celui qu’il fallait… à son cœur… Et pour cela, je ne devais pas la tuer… Mais un fatal vertige m’a saisi… et, après le crime… je me suis éveillé comme d’un songe… Et ce n’est pas un songe, hélas !… je l’ai tuée… Et pourtant, jusqu’à ce soir… que de bonheur je lui ai dû !… que d’espérances