Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/477

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que la pensée, peut-être même que sa volonté, Adrienne s’élança vers la table, saisit le flacon et le porta à ses lèvres avides.

Djalma était jusqu’alors resté à genoux ; il poussa un cri terrible, fut d’un bond auprès de la jeune fille, et il lui arracha le flacon qu’elle tenait collé à ses lèvres.

— C’est égal… j’en ai bu autant que toi…, dit Adrienne avec une satisfaction triomphante et sinistre.

Pendant un instant, il se fit un silence effrayant.

Adrienne et Djalma se contemplèrent muets, immobiles, épouvantés.

Ce lugubre silence, la jeune fille le rompit la première et dit d’une voix entrecoupée qu’elle tâchait de rendre ferme :

— Eh bien !… qu’y a-t-il là d’extraordinaire ? tu as tué… tu as voulu que la mort expiât ton crime ;… c’était juste… Je ne veux pas te survivre… c’est tout simple… Pourquoi me regardes-tu ainsi ? Ce poison est bien âcre… aux lèvres ; son effet est-il prompt ?… dis, mon Djalma…

Le prince ne répondit pas ;… tremblant de tous ses membres, il jeta un coup d’œil sur ses mains…

Faringhea avait dit vrai ;… une légère teinte