Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 1.djvu/209

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ses lèvres avec respect. Son hôte l’imita, et tous deux s’avancèrent vers le foyer.

Là se tenait, filant sa quenouille, Mam’Margarid, femme de Joel. Elle était de très-grande taille et portait une courte tunique de laine brune, sans manches, par-dessus sa longue robe de couleur grise à manches étroites ; tunique et robe attachées autour de sa ceinture par le cordon de son tablier. Une coiffe blanche, coupée carrément, laissait voir ses cheveux gris séparés sur son front. Elle portait, ainsi que plusieurs femmes de ses parentes, un collier de corail, des bracelets travaillés à jour, enrichis de grenat, et autres bijoux d’or et d’argent fabriqués à Autun.

Autour de Mamm’Margarid se jouaient les enfants de son fils Guilhern et de plusieurs de ses parents, tandis que les jeunes mères s’occupaient des préparatifs du repas du soir.

— Margarid, — dit Joel à sa femme, — je t’amène un hôte.

— Qu’il soit le bien venu, — répondit la femme tout en filant sa quenouille. — Les dieux nous envoient un hôte, notre foyer est le sien. La veille du jour de la naissance de ma fille nous aura été favorable.

— Que vos enfants, s’ils voyagent, soient accueillis comme je le suis par vous, — dit l’étranger avec respect.

— Et tu ne sais pas quel hôte les dieux nous envoient, Margarid ? — reprit Joel. — Un hôte tel qu’on le demanderait au bon Ogmi pour les longues soirées d’automne et d’hiver, un hôte qui a vu dans ses voyages tant de choses curieuses, surprenantes ! que nous n’aurions pas de trop de cent soirées pour écouter ses merveilleux récits.

À peine Joel eut-il prononcé ces paroles, que tous, depuis Mamm’Margarid et les jeunes mères, jusqu’aux jeunes filles et aux petits enfants, tous regardèrent l’étranger avec une curieuse avidité, dans l’attente des merveilleux récits qu’il devait faire.

— Allons-nous bientôt souper, Margarid ? — dit Joel. — Notre hôte a peut-être aussi faim que moi ? et j’ai grand faim.